chapitre 3
45. ARTICLE |PRINCIPE
L’équité vise une juste représentation de toutes les diversités et concerne la représentativité de ces groupes dans les organisations et institutions, les manières dont elles sont représentées dans les œuvres et leur reconnaissance professionnelle.
REPRÉSENTATIVITÉ DES ARTISTES
46. ARTICLE | PRINCIPE
L’équité concerne la représentativité proportionnelle des artistes. À cette fin :
47. ARTICLE | APPROCHE
Les organisations doivent s’éduquer aux codes propres des divers univers sociaux, culturels et artistiques, et adapter leurs pratiques de manière informée, tout en favorisant la mixité des personnes concernées, dont les artistes, au sein des processus décisionnels.
Pour mettre en œuvre cet article, il faut : Décloisonner les réseaux artistiques et les univers esthétiques des institutions culturelles.
Ce qui peut vouloir dire :
- Proposer activement des opportunités de création dirigées par des les artistes noir.e.s, autochtones, racisé.e.s, handicapé.e.s, sourd.e.s, LGBTQ2S+, ou issu.e.s d’autres groupes qui sont minorisés.
- Sensibiliser les équipes artistiques et les directions artistiques aux esthétiques issues de traditions non-dominantes ou de groupes culturels minoritaires.
- Connecter les réseaux artistiques informels aux réseaux institutionnels en tenant des activités ouvertes dédiées à la rencontre et au réseautage entre les artistes.
- Développer des collaborations sur un pied d’égalité avec des organisations artistiques portées et représentatives d’artistes noir.e.s, autochtones, racisé.e.s, handicapé.e.s, sourd.e.s, LGBTQ2S+, ou issu.e.s d’autres groupes qui sont minorisés.
- Créer des rencontres sous diverses formes (ateliers, jeux, résidences, etc.) entre artistes issu.e.s de différents milieux, mettant de l’avant la création et la rencontre et permettant de faire émerger de nouvelles collaborations.
48. ARTICLE | APPROCHE
Les diversités sociales, culturelles et artistiques doivent être connues et reconnues via des démarches de sensibilisation et d’éducation, qui se traduisent par des approches actives et en continu, dans une optique de changement systémique et organisationnel afin de familiariser la société (grand public, médias, organisations, institutions) à la présence de préjugés et d'étiquetage.
Pour mettre en œuvre cet article, il faut : S’assurer que les lieux culturels soient des espaces sécuritaires dénués de discrimination
Ce qui peut vouloir dire :
- Adopter des politiques anti-discrimination, anti-harcèlement et anti-racisme, afin de rendre explicites les engagements et les recours face à des situations de discrimination au sein de l’organisation.
- Former les équipes aux pratiques anti-oppressives, afin de favoriser un milieu de travail et de diffusion sans préjugé, sans discrimination et où est cultivée la critique constructive.
- Favoriser l’embauche de personnel sourd ou parlant la langue des signes québécoise (LSQ), afin de faciliter les communications en LSQ et le lien avec les communautés sourdes.
- Jouer un rôle d’influence sur les orientations des programmes de financement, afin de rendre disponibles les ressources requises aux changements structurels et organisationnels nécessaires.
- Intégrer des stratégies d’ organisations apprenantes, tels l’ évaluation évolutive, la formation continue ou l’accompagnement ciblé, afin de répondre aux défis rencontrés.
49. ARTICLE | APPROCHE
Les milieux culturels doivent permettre aux artistes l’accès équitable aux différents services et offres, notamment les financements, les processus variés et ouverts de sélection, ainsi que par du soutien et de l’accompagnement adapté au contexte de l’artiste.
Pour mettre en œuvre cet article, il faut : Développer des processus ouverts et accessibles de sélection et de programmation, favorisant une mixité dans les artistes représenté.e.s.
Ce qui peut vouloir dire :
- Mettre en place des processus ouverts, publics et équitables d’auditions ou de sélection, assurant une égalité des chances entre les artistes, plutôt que de passer uniquement par les réseaux déjà établis.
- Se doter de cibles en termes de représentation des artistes noir.e.s, autochtones, racisé.e.s, handicapé.e.s, sourd.e.s, LGBTQ2S+, ou issu.e.s d’autres groupes qui sont minorisés, afin de pouvoir effectuer des suivis et des évaluations des actions entreprises.
- Proposer des résidences de création destinées à des artistes peu représenté.e.s au sein de la programmation, dans le but de développer des liens à plus long terme.
Exemple de résidences : Place des Arts - Proposer des processus d’accompagnement pour soutenir les réponses aux appels à projets et aux autres concours, afin de répondre aux barrières rencontrées par les artistes issu.e.s de groupes minorisés.
- Proposer différentes modalités de réponses aux concours, par exemple une soumission vidéo plutôt que de longs formulaires bureaucratiques.
50. ARTICLE | APPROCHE
Les parties prenantes des organisations et institutions doivent être représentatives des diversités, utiliser des critères de sélection ouverts à celles-ci, développer et entretenir des pratiques de travail inclusives.
Pour mettre en œuvre cet article, il faut : Consolider la présence de groupes qui sont minorisés au sein de la gestion et de la gouvernance des organisations.
Ce qui peut vouloir dire :
- Favoriser la présence de personnes noires, autochtones, racisées, handicapées, sourdes et issues d’autres groupes minorisés à tous les niveaux des organisations culturelles (conseil d’administration, direction, gestion, programmation artistique, etc.), en adoptant par exemple une politique d’équité ou d’embauche affirmative.
- Former des jurys équitables, représentant une diversité de codes artistiques et esthétiques, afin de favoriser une sélection ouverte aux univers culturels qui ne sont pas dominants.
- Créer des comités aviseurs rémunérés sur la programmation artistique, dont les membres sont représentatifs de différents groupes sociaux, culturels et artistiques, pouvant soutenir l’organisation dans le développement de ses réseaux artistiques, tout en conseillant les pratiques de création pour éviter les faux pas.
- Favoriser la programmation de la relève, en complément ou en collaboration avec des artistes établi.e.s.
Exemple de l’appel à projets du Conseil des Arts de Montréal - Évaluer en continu la justesse et l’ouverture des processus de sélection à partir de leurs résultats.
FORMES DES REPRÉSENTATIONS
51. ARTICLE | PRINCIPE
L’équité relève des manières dont on représente artistiquement les diversités sociales et culturelles et concerne la justesse des représentations collectives à propos des groupes sociaux qui sont minorisés. À cette fin :
52. ARTICLE | APPROCHE
Les programmations doivent être élargies en termes de vision, de curiosités et d’intérêts, afin de permettre la découverte et de mettre de l’avant la pluralité et l’hybridation des formes artistiques ainsi que la représentation d’une diversité d’artistes.
Pour mettre en œuvre cet article, il faut : Diversifier les répertoires artistiques au sein de la programmation.
Ce qui peut vouloir dire :
- Favoriser la diversité des sources et des repères culturels dans la programmation, en présentant différents artistes, genres ou formes d’art.
- Présenter des classiques qui sont issus des traditions culturelles autochtones, africaines, latino-américaines, asiatiques, moyen-orientales, polynésiennes ou mondiales, en s’assurant que les personnes dépositaires de ces traditions jouent un rôle significatif dans la direction artistique.
- Hybrider les genres artistiques et promouvoir l’interdisciplinarité dans la création, afin d’offrir des occasions de collaboration et de création inédites faisant évoluer les pratiques artistiques.
- Intégrer des œuvres provenant d’artistes noir.e.s, autochtones, racisé.e.s, handicapé.e.s, sourd.e.s, LGBTQ2S+, ou issuEs d’autres groupes qui sont minorisés au sein de la programmation régulière, plutôt qu’uniquement en marge de celle-ci dans des événements spéciaux.
- Sortir des scènes traditionnelles afin d’expérimenter d’autres formats de représentations, pouvant être plus adaptés à certaines propositions culturelles (salles plus intimes, représentations décontractées, performances dans l’espace public, etc.).
- Proposer des activités d'initiation à certains répertoires artistiques moins connus, pour susciter la curiosité du public et des équipes, tout en servant de levier à l’intégration durable de ces répertoires dans la programmation.
- Favoriser les créations contemporaines, la liberté artistique et la diversité des expressions artistiques, afin de permettre à de nouvelles propositions d’émerger.
53. ARTICLE | APPROCHE
Les talents et les œuvres issus de groupes qui sont minorisés doivent être reconnus et représentés de manière intelligente, juste et empathique afin d’éviter les préjugés, caricatures et stéréotypes.
Pour mettre en œuvre cet article, il faut : Familiariser et sensibiliser les publics aux diversités sociales, culturelles et artistiques à travers la programmation artistique de l’institution.
Ce qui peut vouloir dire :
- Présenter des œuvres portant sur les diversités et les réalités vécues par des groupes qui sont minorisés, par exemple une pièce de théâtre sur l’autisme menée par des artistes autistes.
- Mettre en lumière les nuances et les diversités dans les œuvres, afin d’éviter de se camper dans une normalité présumée et dans l’objectif de valoriser les diversités sociales et culturelles.
- Dénoncer les préjugés et les stéréotypes avec humour au sein des œuvres, en évitant de reproduire les caricatures.
- Transformer à travers l’art les perceptions collectives à propos des groupes qui sont minorisés, en touchant le public grâce à l’intelligence et aux talents des artistes qui en sont issu.e.s.
- Éviter à la fois les représentations caricaturales et stigmatisantes et les représentations idéalisées, pour privilégier la justesse et la nuance.
54. ARTICLE | APPROCHE
Les œuvres issues de groupes qui sont minorisés doivent bénéficier de moyens équitables et d’une visibilité équivalente aux autres œuvres de la programmation.
Pour mettre en oeuvre cet article, il faut : Soutenir adéquatement les créations portées par des artistes noirEs, autochtones, raciséEs, handicapéEs, sourdEs, LGBTQ2S+, ou issuEs d’autres groupes qui sont minorisés.
Ce qui peut vouloir dire :
- Établir des budgets de création équivalents aux autres œuvres de la programmation pour les créations d’artistes noir.e.s, autochtones, racisé.e.s, handicapé.e.s, sourd.e.s, LGBTQ2S+, ou issu.e.s d’autres groupes qui sont minorisés.
- S’assurer de mettre en place des mesures d’appui supplémentaires aux créations menées par des artistes noir.e.s, autochtones, racisé.e.s, handicapé.e.s, sourd.e.s, LGBTQ2S+, ou issu.e.s d’autres groupes qui sont minorisés, afin de répondre de manière flexible aux freins spécifiques rencontrés au sein des milieux culturels.
- Offrir des outils de création et de recherche pour soutenir les processus créatifs et répondre aux barrières rencontrées par les artistes issu.e.s de groupes minorisés.
- Offrir de l’accompagnement (réseautage, administratif et artistique) via des guichets d’accès par les institutions culturelles et le Conseil des arts par exemple, pour s’assurer d’un soutien adéquat auprès des artistes issu.e.s de groupes minorisés.
- Mettre de l’avant les exemples inspirants permettant aux talents issus des diversités sociales, culturelles et artistiques d’être reconnus à leur juste valeur.
- Développer des stratégies de promotion permettant de rejoindre autant les publics traditionnels que de nouveaux publics qui pourraient s’identifier aux repères culturels présents dans la programmation.
- Intégrer des artistes et des publics noir.e.s, autochtones, racisé.e.s, handicapé.e.s, sourd.e.s, LGBTQ2S+, ou issu.e.s d’autres groupes qui sont minorisés au sein des campagnes de promotion, afin de soutenir le développement d’une identification et d’un sentiment d’appartenance aux organisations culturelles
- Jouer un rôle d’influence auprès des médias afin qu’ils se dotent de mécanismes de couverture des oeuvres crées par des artistes noir.e.s, autochtones, racisé.e.s, handicapé.e.s, sourd.e.s, LGBTQ2S+, ou issu.e.s d’autres groupes qui sont minorisés, par exemple par la mise en place de cible ou de quota quant à leur couverture.
RECONNAISSANCE PUBLIQUE ET PROFESSIONNELLE
55. ARTICLE | PRINCIPE
L’équité concerne la reconnaissance publique et professionnelle des artistes, des formes d’arts et des œuvres. À cette fin :
56. ARTICLE | APPROCHE
Les mécanismes de reconnaissance professionnelle et de légitimité artistique doivent être ouverts à toutes les diversités.
Pour mettre en œuvre cet article, il faut : S’assurer de la présence de critères artistiques équitables et de dispositifs de reconnaissance artistique ouverts et inclusifs.
Ce qui peut vouloir dire :
- S’assurer d’une diversité de référents culturels au sein des concours, des nominations et des jurys, notamment en révisant les critères pris en compte et la composition des comités d’évaluation.
- Reconnaître formellement les formations artistiques réalisées hors du Québec, du Canada et des pays nord-américains et européens.
- Reconnaître formellement les parcours artistiques atypiques menés en dehors des institutions.
- Développer des prix d’excellence dédiés aux artistes émergent.e.s, avec un accent sur la promotion d’une diversité d’artistes.
- Développer des stratégies de communication adaptées pour la mise en valeur d'œuvres et d’artistes issus de groupes minorisés.
57. ARTICLE | APPROCHE
Les pratiques de gestion doivent se porter garantes des enjeux d’équité, en développant leur flexibilité et en reconnaissant l’expertise des artistes, des travailleurs et des travailleuses culturelles, ainsi que la légitimité de leurs pratiques, quels que soient les parcours de formation dont ils et elles sont issu.e.s.
Pour mettre en œuvre cet article, il faut : Créer les conditions organisationnelles pour une transformation durable des milieux culturels.
Ce qui peut vouloir dire :
- Développer des collaborations et des partenariats avec des organisations spécialisées en équité afin d’aller chercher leurs expertises pour effectuer des transformations en profondeur dans la gestion de l’organisation.
- Développer des incitatifs financiers et réglementaires auprès des organismes professionnels pour accentuer la reconnaissance professionnelle des artistes noir.e.s, autochtones, racisé.e.s, handicapé.e.s, sourd.e.s, LGBTQ2S+, ou issu.e.s d’autres groupes qui sont minorisés.
- Mettre en place des systèmes de quota concernant le pourcentage des montants totaux des bourses et des subventions attribuées à des créations prenant en compte des critères d’équité.
- Offrir de l’accompagnement (réseautage, administratif et artistique) via des guichets d’accès par les institutions culturelles et le Conseil des arts par exemple, pour s’assurer d’un soutien adéquat auprès des artistes issu.e.s de groupes minorisés.
58. ARTICLE | APPROCHE
Les organisations, les institutions et les artistes issu.e.s de groupes minorisés doivent cultiver activement leurs relations réciproques, d’une manière consciente des asymétries de pouvoir entre eux et elles, afin de déjouer les impacts des tensions sociales sur la réception des propositions artistiques.
Pour mettre en oeuvre cet article, il faut : Oeuvrer au développement de relations positives à long terme, fondées sur l’inter-reconnaissance et la confiance réciproque, entre les institutions culturelles et les artistes issu.e.s de groupes minorisés.
Ce qui peut vouloir dire :
- Favoriser l’échange et le transfert de compétences entre les institutions établies et les regroupements artistiques sous-représentés dans les milieux culturels, dans une perspective d’appui mutuel, de développement d’opportunités de création conjointe et de construction de la confiance.
- S’assurer de la récurrence d’opportunités de leadership artistique dans les milieux culturels pour des artistes noir.e.s, autochtones, racisé.e.s, handicapé.e.s, sourd.e.s, LGBTQ2S+, ou issu.e.s d’autres groupes qui sont minorisés.
- Privilégier le dialogue, la rencontre et l’échange face à des conflits ou à des critiques émises à l’endroit de l’organisation.
- Exercer une influence sur les approches de journalisme culturel, en mettant de l’avant l’importance des questions d’équité dans la couverture actuelle et dans la formation des futur.e.s journalistes.
- Soutenir l’intégration d'œuvres ne provenant pas de la culture dominante au sein des cursus scolaires par des collaborations avec des enseignant.e.s.